France : Tuer un enfant / révolte des « nuisibles »

Le texte qui suit est paru initialement sur le site du quotidien AOC, puis sur le site epersonnel d’Alain Lipietz. Parce qu’il nous a paru rappeler des évidences importantes, et de moins en moins évidentes hélas en ces temps d’ ensauvagement politique et policier, nous le reproduisons avec l’aimable autorisation de l’auteur et de ses premiers éditeurs.

Deux policiers conversent avec un jeune conducteur à l’arrêt. Il a 17 ans, pas de permis, il vient de bruler (diront-ils) plusieurs feux rouges. Un policier tient l’enfant en joue, à quelques décimètres de distance. On entend : « Tu vas recevoir une balle dans la tête ». Le garçon démarre quand même. Le policier tire, visant au coeur : la balle traverse le bras de l’enfant et sa poitrine. Le véhicule part dans le décor.

La scène, « grâce à Dieu » , est filmée. Le meurtre est intentionnel, annoncé : avec préméditation. La police explique que le jeune fonçait sur les policiers : le démenti filmé apparait presqu’aussitôt sur les réseaux sociaux. Il n’y a rien à dire, le policier passe aux aveux, les plus hautes autorités appellent la justice à passer , le brigadier est inculpé et incarcéré.

Jusqu’ici tout va bien sauf pour l’enfant, sa mère célibataire et qui n’avait que lui. Et voilà que malgré le mensonge flagrant, trop habituel, les syndicats policiers s’insurgent : le brigadier a droit à la « présomption d’innocence » (non : il y a flagrant délit, il n’a droit qu’à un procès équitable qui reconnaitra éventuellement des « circonstances atténuantes »), il ne faisait qu’appliquer la loi, qui autorise à tirer en cas de « délit de fuite ». Le législateur avait oublié de préciser « à tirer dans les pneus » : eux, ils avaient compris : « à tier dans la tête ou au coeur ». Tirer pour tuer. Ce qu’on appelle : une condamnation à mort administrative et sans appel. Voilà ce qu’ils avaient compris.

La palme va un moment à la Cfdt-Police qui condamne l’appel de la mère à une Marche blanche, initiative traditionnelle des parents cherchant à éviter que les chose dégénèrent. Elles dégénéreront quand même. Elle sera vite arrachée à la CFDT par l’UNSA et Alliance Police qui invoquent la « guerre » en cours contre les « nuisibles », où la police incarnerait la « résistance ».

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